Comptes-Rendus

ALPINISME Dernier week-end, nouveau concept : un 3000 le samedi, un 4000 le dimanche

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La saison d’alpinisme touche à sa fin, alors pour oublier la tristesse des refuges qui ferment et l’automne qui arrive, on mise sur un beau programme avec un maximum de chaleur Suisse Allemande ! (ndla : oxymore ethnologique)

Le samedi, ce sera l’arête sud du Jegihorn (3206m) et le dimanche, le clou du spectacle : l’arête Sud du Lagginhorn (4010m), une des plus grosses courses de la cuvée des collectives 2018. Le topo évoque une « longue course d’arête à 4000m à ne pas sous-estimer ». On ne peut pas dire que l’on n’était pas prévenu !

Le soleil quasi permanent du mois de septembre promettait une préparation de week-end des plus aisés mais comme toujours il n’en fut rien ! Des Ecrins à Chamonix, de Martigny aux Alpes Uranaises (dont certains j’en suis sûr ignorent l’existence même), le choix de la destination n’a pas été évident pour nous permettre de faire deux sommets en deux jours tout en réussissant la meilleure combinaison entre temps de route/marche d’approche/sommet de haute montagne/niveau abordable mais intéressant/exposition Est à Sud favorisant l’ensoleillement…… et bien sûr pour le plaisir des participants, un cadre majestueux et du beau rocher à grimper !

Et encore n’est-il ici question que de choisir le bon bout de cailloux ! Mais que serait la préparation d’une collective sans la gestion de l’humain, peut-être plus encore en alpinisme que dans n’importe quelle autre discipline ? Cela m’amène d’ailleurs à une réflexion dont le but ultime n’est pas tant de rendre ce compte-rendu totalement illisible que de diffuser un message de fond : la pratique de l’alpinisme devrait se concevoir pour tout un chacun comme une saison, avec une difficulté progressive, et une augmentation du niveau technique et physique de chacun au fil des sorties, à l’instar de ce qui se fait en ski de randonnée : on fait ses premiers virages en décembre/janvier, des sorties à 1400/1500m de dénivelé en février/mars, et des gros sommets plus alpins en avril/mai. Quand parfois des gens me contactent pour participer à une sortie d’alpinisme en août ou en septembre en n’ayant pas fait de montagne ni d’escalade de l’année, je me sens comme face à quelqu’un qui voudrait démarrer le ski de randonnée au mois de mai. Ainsi j’invite vraiment celles et ceux qui souhaitent pratiquer l’alpinisme à le faire autant que possible avec le club, dont le programme publié dès le printemps aura proposé cette année des week-ends de formation, des sommets à 4000, de la neige, du rocher, et une palette de difficultés allant de « Facile » à « Difficile » en passant par toutes les difficultés intermédiaires. La saison d’alpinisme est courte, 3 mois de mi-juin à mi-septembre, alors nous comptons sur vous pour être au rendez-vous dès le début mais aussi tout au long de la saison !

 

La fine équipe du week-end : Jean-Christophe, Matthieu et Joris

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Refermons la parenthèse et revenons-en à nos cailloux. Du bon gneiss Valaisan en l’occurrence, que Jean-Christophe, Joris, et Matthieu ont eu le plaisir de découvrir ou de redécouvrir pour certains. Rendez-vous à Annecy Nord à 5h45 dans le but d’attraper le téléphérique de Saas-Grund 3h30 plus tard et gravir un premier sommet le samedi : le modeste mais sympathique Jegihorn (3206m), dont l’arête Sud nous permet de réaliser une belle escalade de montagne sur un superbe rocher rouge/orangé dans une ambiance détendue (AD+ / 5a max). Les foules ont déserté les lieux et nous savourons ce bel itinéraire pour nous tous seuls, avec d’autant plus de plaisir que la météo s’est révélée exagérément pessimiste pour ce samedi : point de nuage à l’horizon, soleil et température idéale pour grimper en chaussures d’alpinisme cette très jolie voie alternant entre dalles fines, fissures et couloirs sur un rocher toujours excellent. Et que dire de la vue qui ne nous quittera pas du week-end : une succession des sommets mythiques tous plus majestueux les uns que les autres. Leur simple vue fait immanquablement germer des idées de courses pour la saison prochaine alors avis aux amateurs d’alpinisme pour l’été prochain, affûtez vos crampons et soyez en forme, vous ne le regretterez pas !

 

Joris se régale sur l'arête Sud du Jegihorn

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Escalade ludique en excellent rocher

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Splendide vue sur le massif des Mischabels depuis le sommet du Jegihorn

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Belle vue sur le "monstre" du lendemain ! Le Lagginhorn que nous avons parcouru de droite à gauche. L'arête Sud commence en bas à droite au petit col rocheux au-dessus du glacier.

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Nous profitons de la descente pour faire une école de coinceurs. Joris et Jean-Christophe ont le plaisir de mettre en pratique tous les rudiments du terrain d’aventure : pose de câblés et de friends dans différents types de fissures, et installation de relais sur coinceurs et sur sangles. Mais le soleil se cache vite en cette fin septembre et il faut rentrer rapidos au refuge pour pouvoir… profiter de la bière tant que la terrasse du refuge est ensoleillée ! Quelle bonne surprise d’ailleurs que cette Weissmieshütte, rien à voir avec son homologue Brittania, de l’autre côté de la vallée, qui nous avait laissé un souvenir bien fade. Ici le personnel est sympathique, la bière est excellente, fraîche, et peu onéreuse (entre 5 et 6,5 francs la pinte, excellente blanche en bouteille ou blonde en pression). Le repas du soir est bon et varié, dans une salle chaleureuse. Que du bonheur ! Nous avons même notre propre chambre de 4, un vrai luxe. Seul défaut, la largeur des couchettes, plus adaptée à des enfants en bas âge qu’à 4 adultes. Au moins on n’a pas eu froid !

 

Samedi, journée réussie !

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Le lendemain, le réveil sonne à 4h30 pour attaquer le Lagginhorn par l’arête Sud. En potassant les semaines précédentes, j’ai découvert cette arête qui semble plébiscitée : du bon rocher, une course variée comportant malgré tout une approche glaciaire, un niveau de grimpe modeste et une difficulté globale raisonnable (AD-) mais un caractère sauvage et alpin affirmé. Le cheminement dans la nuit est relativement aisé et nous profitons d’un superbe ciel clair et étoilé. Nous remontons dans l’obscurité vers les pentes de neige et de glace du Weissmies, puis nous bifurquons vers l’Est en direction du Lagginjoch. Nous remontons la langue terminale du glacier tout d’abord grâce aux blocs de pierre qui jonchent le sol, puis la glace vive devient omniprésente et la pente se redresse. Crampons, piolet, et progression encordée s’imposent alors et nous remontons une section plus raide en glace. La pente s’adoucit sur le haut du glacier et nous franchissons la rimaye sur la gauche par un grand pas tandis que le jour se lève. La fréquentation des lieux est très modérée : une cordée est arrivée juste avant nous mais file sur l’arête Nord du Weissmies, et nous observons une seule autre cordée sur l’ arête Sud du Lagginhorn, déjà loin devant car partie du refuge de très bonne heure.

Frontales dans la nuit

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Lever de soleil sur le Valais

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Notre timing est parfait : nous sommes au col du Lagginjoch à 3500m à 7h30 après 2h d’approche, prêts à attaquer l’ascension alors que le soleil vient réchauffer l’arête et illumine les 4000 enneigés, du Mont Rose au Weisshorn. L’escalade de la première moitié de l’arête est fantastique, le rocher orange au lever du soleil offre une escalade plaisir, très abordable et aérienne sur le fil. Nous parvenons vers 9h en haut du gendarme caractéristique à 3906m d’altitude, à la suite duquel l’arête constitue un véritable parcours de montagnes russes. Le rocher est en effet excellent sur le fil, mais très mauvais sitôt que l’on s’en écarte. Il faut donc escalader « en plein ciel »…et désescalader de l’autre côté. 

Belles escalades dans la première partie

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Cheminement astucieux et aérien

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Un long cheminement nous sépare ainsi du sommet, et il faut parfois chercher un peu l’itinéraire pour ne pas corser l’affaire. Au gré des escalades-désescalades, exercice toujours quelque peu délicat pour ceux qui n’y sont pas familiers, cette course très alpine révèle toute son ampleur et le temps file… peu de chance de parvenir à respecter l’horaire du topo du CAS qui donne 4h pour parcourir l’arête. Les nuages montent, on s’active un peu et on atteint le sommet à 4010m à midi, soit 4h30 après avoir quitté le Lagginjoch. Pas si mal. Nous profitons alors d’une pause bien méritée au sommet hélas noyé dans les nuages.  

 Escalade à l'ancienne en fissures et cheminées

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Oups ! Je n'aurai peut-être pas dû affuter la corde...!

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Désecalades aériennes

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Terrain montagne...

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Terrain montagne toujours !

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Les nuages montent au gré de notre progression

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Coup d'oeil dans le rétro...belle ambiance sur cette arête Sud

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Summit...dans le brouillard complet !

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La descente par la voie normale, sorte de sentier suspendu en rochers branlants parfois verglacés, nous fait d’autant plus apprécier la belle arête que nous venons de parcourir. Plus nous descendons, plus nous quittons les nuages et c’est avec plaisir que nous regagnons un autre bout de glacier que nous descendons « en ramasse », pratique ô combien ludique quoique sujette à quelques belles chutes dans la neige ! Nous regagnons la Weissmieshütte à 15h, un peu moins de 10h après notre départ. C’est le tarif pour cette grande course, peu difficile techniquement mais qui nécessite concentration, efficacité et endurance tout au long de l’ascension qui se déroule pendant plusieurs heures entre 3900 et 4000m.

Un Chaos de blocs rocheux constitue la descente.

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Une fois sorti des sections potentiellement dangereuses, la plus grande hantise de ces grandes courses est d’arriver après la fermeture du téléphérique, et ainsi rallonger inutilement une journée déjà bien remplie. En arrivant comme prévu à 15h au refuge, nous nous octroyons tranquillement une nouvelle tournée de bières avant de redescendre vers la gare d’arrivée de Kreuzboden, dont les cabines nous déposent tranquillement à 50m de la voiture. Ça valait le coup de s’activer un peu.

16h, nous arrivons à la gare du téléphérique, il est temps de filer !

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Bravo à Joris pour son premier 4000 et à Jean-Christophe pour qui c’était le second après celui de la collective du 12 août dernier, et merci à Matthieu pour sa participation. Supers moments passés en montagne, et un beau sommet pour conclure une très belle saison. Fini les réveils en plein nuit, place à l'escalade aux heures chaudes de l'après-midi !

 

Club Alpin Français d'Annecy
17 Rue du Mont Blanc
74000 ANNECY
Tél. 04 50 09 82 09
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Ouverture au public :
le mercredi de 15h à 19h
le vendredi de 11h30 à 13h30 et de 17h30 à 20h30

Le Parking est difficile...

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